El-Jarline a la charge d'une ferme à proximité de la cité lunaire de Mut. Le roman est construit comme un journal de bord qui adopte en premier un style concis, administratif. Peu à peu, le personnage est invitée à donner plus de contexte et l'écriture se libère pour décrire en détail le cours des saisons et ses effets sur la nature abritée par la ferme. L'écriture prends un tour plus dramatique quand le personnage principal se décide à enquêter sur les causes de la maladie mortelle qui affecte certains humains. A ce moment là, le lecteur commence à comprendre pourquoi l'humanité s'est réfugiée sur la lune, quelle est l'essence du personnage principal et comment est régie la nouvelle civilisation humaine. Un texte subtil et riche, aussi fertile que la ferme - sujet principal du livre - pour adultes adeptes de délicatesse.

Depuis septembre 2024, Argyll présente des novellas dans une collection nommée RéciFs dont fait partie le bracelet de jade. L'éditeur met en avant des plumes féminines de tous les pays. Ici nous entrons dans l'imaginaire Chinois par l'écriture de Mu Ming. L'autrice livre une vision singulière de l'art sacré du jardin, en ce que celui-ci cherche à refléter le cosmos et ses lois physiques. Au fil de l'écriture, la quête du père s'avère s'approcher de la maîtrise des lois cachées de la physique. Le texte imbrique la vision du père et celle de la jeune Chen dont la vie évolue comme un jardin évolue au fil des saisons. L'écriture est délicate et maîtrisée, à la manière d'un conte philosophique, elle nous mène avec légèreté jusqu'à la fin du récit qui se conclue avec la fin de vie de Chen. On referme le livre en se disant qu'il se prête à des lectures multiples tant le texte est riche en significations. Pour ceux qui aiment prendre le temps de savourer.

Tout est dit dans la présentation de l'éditeur. Il faut se laisser capter par le dessin pour mieux entrer dans cette histoire fabuleuse qui peut très bien être lue en famille.
Tout public.

Au fil du texte de Marie Pavlenko, le lecteur apprend à connaître Astrid qui s'est littéralement réfugiée en montagne, dans un hameau dépeuplé que l'on devine proche du Mercantour. Les indices savamment distillés font comprendre que cette femme encore jeune a vécu un drame récent et qu'elle cherche le retour à la vie ou plutôt à elle-même. Au début du roman, le personnage semble refermé sur lui-même, évitant au plus les contacts, ayant coupé ses liens avec ses proches.
Par petite touches, l'autrice attache le lecteur à ce personnage de femme en lutte qui tout à coup doit se mobiliser pour la survie d'autrui car dans ce hameau reculé, une très jeune femme est en péril et appel à l'aide : elle doit donner naissance. Alors le texte va de l'une à l'autre femme entretenant le suspens autour du devenir des deux : quels choix vont-elles faire ? Un très beau roman de la résilience porté par une belle maîtrise de la langue.

Sous la ramée d'un arbre sacré, le Jacaranda de la maison de tante Eusébie, le lecteur parcours l'histoire moderne de Kigali par les rencontres du personnage principal. 24 années post-génocide sont évoquées à partir d'une trame simple : la découverte de ses origines par Milan. D'abord jeune garçon, il assiste à distance en France au génocide puis gagné par la curiosité au fil des années, il rencontre des membres de sa famille rwandaise dont sa mère s'est séparée. Pour quelles raisons cette prise de distance ? Quels secrets de famille sont-ils nés de la persécution par le génocide ? Comment vivre alors que les morts sont encore si présents et que les actes de violence ont fracturé les communautés ?
Ces questions sous-jacentes au récit sont portées par un récit prenant et facile à lire. Chaque page nous donne un peu plus envie de savoir si Milan pourra aller jusqu'au bout de sa quête des origines et faire la paix avec sa mère si mutique sur le passé. Au fil des pages, le narrateur rend vivace la peine des survivants et de la génération nouvelle, sur laquelle pèse l'injonction à faire la paix et à vivre ensemble malgré l'horreur. Sans proposer de réponse toute faite, l'auteur nous invite à réfléchir aux rôles de l'oubli et de la mémoire, à ce qui peut être dit et ce qui reste à jamais indicible. Un récit salvateur.